Socialement invisible : la persécution des femmes chrétiennes

Santé 10 mars 2022

La persécution religieuse touche différemment les hommes et les femmes. Ce constat est né d’une recherche menée pour la 5e année consécutive par la World Watch Research (WWR), un département lié à l’ONG Portes Ouvertes, qui soutient les chrétiens persécutés. Son rapport 2022 démontre le côté insidieux, stratégique et endémique de la persécution invisible menée contre les femmes.

 

Violences sexuelles, mariages forcés et autres violences physiques sont les points de pression les plus graves que de nombreuses chrétiennes subissent, souvent à l’insu de tous. Cette année encore, le Rapport 2022 sur la persécution selon le genre lève le voile sur cette réalité souvent invisible mais dévastatrice.


Points de pressions spécifiques aux hommes et aux femmes

La persécution envers les hommes chrétiens vise à les mettre hors-jeu, en tant que pourvoyeurs financiers de leur cercle social, afin d’accentuer la vulnérabilité de leurs proches. Dans toutes les régions analysées, les persécutions qui les concernent prennent la forme de risques d’enlèvements, d’emprisonnements, de violences physiques et d’enrôlement dans des milices ou groupes militaires. Les hommes sont également plus susceptibles que les femmes d’être tués pour leur foi.

La persécution des femmes et des jeunes filles chrétiennes prend des formes plus cachées, visant à les réduire au rang d’objets sexuels et de vecteurs de honte. Ainsi, elles sont victimes de violences sexuelles, de mariages forcés et de traite des êtres humains. Généralement considérées comme de moindre valeur, leurs capacités de procréation et leur pureté sexuelle sont visées. Elles risquent en outre d’être vendues comme épouses, en particulier dans les pays asiatiques, ou d’être réduites en esclavage sexuel par des groupes extrémistes en Afrique qui les considèrent comme des trophées de guerre capables de porter de futurs combattants.

 

La violence en chiffres

La violence est mesurée par l’analyse des “points de pression” subies par genre et par région. Le terme est utilisé pour renvoyer à la fois aux pressions et aux violences infligées dans le cadre de la persécution religieuse.

Voici les 5 principaux points de pression, qui concernent les femmes, et qui ont été signalés dans les 50 premiers pays de l’Index mondial de persécution, aux taux suivants:

  • Violence sexuelle : signalée dans 90% des pays (88% dans le rapport précédent)
  • Mariage forcé (88%),
  • Violence physique (78%),
  • Violence psychologique (78%, contre 74% en 2021)
  • Séquestration à domicile (66%)

De manière générale, les femmes sont le plus mises sous pression en Afrique subsaharienne (score de 10,8) et au Moyen-Orient – Afrique du Nord (10,6 points), alors que c’est en Amérique Latine que les hommes subissent le plus haut score moyen de points de pressions, avec 10,1.

 

Facteurs aggravants

Intensifiées par les conflits, les crimes et les crises, les persécutions spécifiques liées au genre ont par exemple été exacerbées lors de la prise de pouvoir par les talibans en Afghanistan ou de la pandémie de COVID-19. Le pouvoir et le contrôle omniprésent des cartels et des gangs criminels liés à la drogue, dans certaines régions, créent un appel d’air pour le déploiement de la persécution religieuse des chrétiens par le biais de la violence sexiste, y compris la manipulation physique et psychologique.

 

Sarah, chrétienne d’Afrique du Nord

Le parcours de Sarah (prénom d’emprunt), fille d’imam en Afrique du Nord, illustre comment la persécution impacte les chrétiennes dans toutes les sphères de leur vie. Pour elle, tout a commencé le jour où son père, qui dirige la famille d’une main de fer, a découvert la Bible cachée sous son lit.

Il la bat et lui crie: «Tu mérites la mort.» Sa famille la met à la rue puis fait courir une fausse rumeur humiliante à son sujet: Sarah aurait quitté le foyer familial pour vivre hors mariage avec un homme. Dans son contexte, ces pratiques sont considérées comme un moyen normal et approprié de contrôler une fille qui fait valoir son droit à la liberté de religion.
Puis la famille de Sarah la convainc qu’un mariage arrangé ferait taire les ragots et permettrait une réconciliation familiale. «L’homme que tu épouseras te purifiera de tous tes péchés et nous pourrons nous réunir.»

Ce mariage forcé est un désastre. Sarah est maintenue enfermée à son nouveau domicile et subit des violences sexuelles jusqu’à ce que son mari la mette à la porte à son tour. Sarah se retrouve une nouvelle fois à la rue, dans une société où il n’est pas acceptable pour une femme de vivre seule, même si elle a les moyens de le faire.

 

De : Portes Ouvertes, au service des chrétiens persécutés
Source
: Communiqué de presse, Mars 2022