À la lumière d’un deuil : comment Ellen White a affronté une perte inattendue

Actualité Adventiste 7 avril 2022

Les deux dernières années ont été marquées par la perte et le deuil. Au-delà de la douleur qui accompagne la perte d’un être cher, beaucoup, dans le chaos de la pandémie actuelle, sont encore en train de faire face au tourbillon d’émotions occasionné par les carrières bouleversées, les plans compromis, les rêves non réalisés. Il peut être pénible de traverser le brouillard de ces réalités.

Dans l’une de mes congrégations, il y a eu un décès soudain et important. Et mon esprit s’est mis à graviter autour d’une citation autre-fois accrochée au mur de la maison de mes beaux-parents. Ces mots précieux – écrits par Ellen White, cofondatrice de l’Église adventiste, après l’enterrement de son mari, son partenaire dans le ministère – avaient été encadrés et placés de manière à être bien visibles. Après un accident tragique qui avait coûté la vie à l’un de leurs amis, ces mots avaient été pour eux une source de réconfort et d’encouragement.

Je me suis alors demandé si l’expérience personnelle et les conseils inspirés d’Ellen White pouvaient guider ceux qui s’efforcent de surmonter leurs propres pertes.

 

LE DEUIL, UN POIDS ÉCRASANT

Alors qu’Ellen White se rendait en calèche de Battle Creek à Charlotte, au Michigan, pour un week-end de conférences avec James, son mari, elle fut impressionnée de voir à quel point Dieu avait rétabli celui-ci. Quinze ans plus tôt, James avait fait un AVC dont les conséquences avaient été importantes. Mais maintenant, il pensait clairement, se déplaçait librement, et parlait avec puissance. Ellen mit par écrit ce qu’il était en train de dire : « Maintenant que Dieu m’a donné une force physique et mentale renouvelée, je sens que je peux servir sa cause comme jamais auparavant1. »

Devant se rendre au Colorado et sur la côte du Pacifique, Ellen eut amplement le temps d’écrire. En outre, elle déclara : « Nous espérions pouvoir assister ensemble à l’aboutissement triomphant de l’œuvre de Dieu lors du retour de Jésus2. »

Au cours de ce voyage estival, un orage les prit par surprise. James souffrit légèrement de froid dû à cet orage, mais il ne s’en soucia guère. Le sabbat suivant, il ouvrit le service dans le Battle Creek Tabernacle par des chants et des prières. Mais le lundi suivant, tout bascula. Il tomba malade et, après six jours dans un sanatorium, il rendit son dernier soupir.

Quelle perte inattendue ! Dans son grand chagrin, Ellen White a écrit : « Le protecteur choisi de ma jeunesse, le compagnon de ma vie, le partenaire de mes labeurs et de mes afflictions n’est plus à mes côtés. Je dois terminer mon œuvre et mener la bataille seule3. » «Le choc de la mort de mon mari–si soudaine, si inattendue – s’est abattu sur moi tel un poids écrasant »4.

 

LA PERSPECTIVE DE L’ÉTERNITÉ

Ce n’était pas la première fois qu’Ellen White était confrontée à une perte tragique. Son plus jeune fils, Herbert, mourut en bas âge en décembre 1860. Trois ans plus tard, James et Ellen perdirent leur fils aîné, Henry, âgé de 16 ans. Les deux parents et les deux fils survivants versèrent d’abondantes larmes à la mort du bébé, ainsi qu’à celle du fils aîné, dont les doux chants leur manquaient cruellement5. Cependant, à chaque perte, Ellen ne cessa de fixer les yeux sur la résurrection qui aura lieu au retour de Jésus.

Suivant le conseil de Paul à l’église de Thessalonique, Ellen ne s’affligea pas « comme les autres qui n’ont point d’espérance ». Elle connaissait l’état des morts et la promesse de la résurrection. Elle fixait les yeux sur la réalité selon laquelle le sommeil terrestre de la mort sera bientôt inversé pour ceux qui ont aimé Jésus.

À un moment donné de son ministère, Ellen White conseilla un pasteur en deuil qui avait « cultivé la tristesse dans [son] cœur, [qui s’était] complu en elle ; [qui avait] permis à [son] esprit et à [ses] pensées de nourrir égoïstement [son] chagrin »6. Se trouvant à son tour dans la même situation, elle écrivit : « Je ressens vivement ma perte, mais je ne me permettrai pas de donner libre cours à un chagrin inutile7. »

Ellen White ne niait pas la réalité du deuil dans l’expérience des autres, ni même dans la sienne. Elle ne minimisait pas l’importance de travailler sur ces émotions complexes. Elle faisait cependant une distinction entre la tendance à pleurer la perte dans un chagrin égocentrique et obsessionnel pour lequel il n’y a aucun remède et le deuil vécu à la lumière des promesses de Dieu, promesses d’espérance selon lesquelles la tristesse se changera en joie. Cette expérience, nous pouvons nous aussi la vivre aujourd’hui par la foi en la Parole de Dieu.

 

REPRENDRE LE COLLIER

Au bout d’un certain temps, Ellen White en vint à pouvoir « regarder avec joie le lieu où il [James] repose »8. Elle s’attendait, en effet, à ce que son mari endormi sorte bientôt de la tombe. Forte de cette nouvelle paix, elle décida d’honorer la mémoire de son mari en poursuivant l’œuvre que Dieu lui avait confiée.

Alors qu’au début de son récit, elle se désolait de devoir aller de l’avant sans son compagnon, finalement, elle résolut de poursuivre sa mission : « J’entreprends seule l’œuvre de ma vie, dans la pleine assurance que mon rédempteur sera avec moi »9.

Et elle reprit, en effet, l’œuvre qui lui avait été confiée. Dix ans après le décès de James, elle monta à bord d’un bateau à destination de l’Australie. Là, elle établit de nouveaux ministères et écrivit des livres importants. Elle souhaitait que son ministère soit caractérisé par la gentillesse, la douceur et la patience, plus encore que par l’accomplissement de ses devoirs. Son propre deuil l’a rendue plus sensible aux luttes des vivants.

 

UN DÉFI POUR LES VIVANTS

Ellen White aborde deux moyens pratiques de gérer le deuil. Premièrement, elle nous recommande de résister davantage au péché et aux puissances des ténèbres, les deux ayant apporté l’aiguillon de la mort et de la perte. Deuxièmement, elle nous encourage à servir Christ avec une passion plus grande encore, sachant que les cicatrices du chagrin humain ne seront complètement guéries que lorsque le Soleil de la justice se lèvera avec la guérison sous ses ailes (voir Ml 4.2).

En cette période de pertes et de deuils à l’échelle mondiale, ces mots que les parents de ma femme ont commémorés et encadrés comme un portrait constituent un défi et une étape positive sur le chemin de la guérison : « La meilleure façon pour moi et mes enfants d’honorer la mémoire de celui qui est tombé, dit Ellen, c’est de reprendre l’œuvre là où il l’a laissée et, dans la force de Jésus, de la mener à bien »10.

Nous pouvons, nous aussi, honorer ceux que nous avons perdus en allant de l’avant avec un objectif renouvelé, aspirant à revoir leurs visages, et surtout, à voir le visage de notre rédempteur qui nous donne la force d’y arriver.

 

 

Auteur : Jarod Thomas – Adventist World

Sources

  • Ellen G. White, Life Sketches of Ellen G. White, Mountain View, Calif., Pacific Press Pub. Assn., 1915, p. 249.
  • Ibid., p. 247.
  • Ibid.
  • Ibid., p. 252.
  • Ellen G. White, Testimonies for the Church, vol. 1, p. 103.
  • Idem., Pour un bon équilibre mental et spirituel, p. 476.
  • Idem., Life Sketches, p. 253 (c’est nous qui soulignons).
  • Ibid.
  • Ibid., p. 254.
  • Ibid., p. 253.